Hyaluronidase : panorama de ses propriétés, applications et effets secondaires

Article analysé par Docteur Christine Noé

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Hyaluronidase : panorama de ses propriétés, applications et effets secondaires

Hyaluronidase: An overview of its properties, applications, and side effects

H Jung

Gangnam L Plastic Surgery Center, Sejong, Korea

Etude coréenne

Les auteurs partent du constat que la hyaluronidase, quoi qu’utilisée depuis plus de 60 ans est finalement assez mal connue des éventuels utilisateurs.

Ils rappellent les indications reconnues par la FDA avec entre autres, l'hypodermoclyse, l'optimisation de l'absorption des médicaments délivrés en sous-cutané et les indications radiologiques. S'y ajoutent l'accélération de la résorption des hématomes et bien sûr les indications dans le cadre de l'esthétique : traitement des sur-corrections d'acide hyaluronique, traitement des réactions granulomateuses et le traitement de la nécrose cutanée associée aux injections de fillers.

Un petit paragraphe pour rappeler l'importance de l'acide hyaluronique comme composant majeur de la matrice extracellulaire, et sa large utilisation à en esthétique. Pour comprendre l'impact de la hyaluronidase, il faut se rappeler la structure de l'acide hyaluronique et le principe de sa fabrication dont la réticulation permet de stabiliser et ralentir la décomposition.

La hyaluronidase est une endoglycosidase qui décompose l'acide hyaluronique en monosaccharides. Elle peut aussi décomposer d'autres mucopolysaccharides acides du tissu conjonctif.

Les différents types de hyaluronidases, les organes et fluides où elles sont présentes et leurs activités sont détaillés. En résumé, sur les 6 types de hyaluronidases répertoriées, la plus active est la hyaluronidase 1, présente dans le foie, les reins, la rate et le cœur, le sérum et l'urine. Elle est activée à pH acide. Je signale tout de même l'utilité de la hyaluronidase testiculaire PH-20 qui permet de dégrader l'acide hyaluronique dans l'ovule pour favoriser la fécondation.

Les différents classements des hyaluronidases sont énoncés

– les trois catégories de Meyer selon le mécanisme d'action : hyaluronidases de mammifères dégradant l'acide hyaluronique en tétrasaccharides. hyaluronidases de sangsues/ankylostomes aboutissant à des pentasaccharides et des hexasaccharides. et hyaluronidases microbiennes produisant des disaccharides insaturés.

– classement en deux types selon le pH d'activité : acide (pH de 3 à 4) ou neutre (pH de 5 à 8, présentes dans le venin de serpent et d'abeille).

On en vient à un petit historique : la hyaluronidase médicale était initialement extraite de testicules de bovins ou de moutons et peu purifiée d'où des risques allergiques. Les techniques de purification et l'arrivée de la hyaluronidase microbienne de Streptococcus agalactiae ont permis de réduire ces risques.

Il existe de nombreux inhibiteurs de la hyaluronidase dans le plasma et la hyaluronidase est dégradée dans les reins et le foie. La demi-vie de la hyaluronidase injectée dans le tissu sous-cutané est inférieure à 30 minutes et de 2 à 3 minutes par voie intraveineuse.

Divers médicaments influent sur son métabolisme. Parmi les antagonistes, signalons les anti-inflammatoires (indométhacine, dexaméthasone et salicylates), des extraits de plantes ( flavonoïdes et antioxydants), des antihistaminiques, l'héparine, la vitamine C, des produits de contraste. La proportion des inhibiteurs de la hyaluronidase peut augmenter en réponse à certaines situations : brûlures, septicémie et choc à risque de collapsus.

On en vient enfin à l'utilisation de la hyaluronidase pour dissoudre l'acide hyaluronique des produits de comblements. Le préalable est l'accès aux liaisons intramoléculaires de l'acide hyaluronique avec deux facteurs principaux à considérer : le nombre de crosslinks entre les molécules d'acide hyaluronique et la concentration en acide hyaluronique. Plus la réticulation est importante, plus il est difficile pour la hyaluronidase d'accéder aux sites de liaison ce qui accroît la durée nécessaire à la dissolution du filler. Plus la concentration en acide hyaluronique est élevée, plus sa dissolution sera lente. Les fillers monophasiques sont moins exposés à la hyaluronidase que les polyphasiques.

Concernant l'utilisation en cosmétique, seules les injections intravasculaires sont abordées. Les auteurs se réfèrent à une publication de 2014 (De Lorenzi) et des expérimentations menées chez l'animal (Wang en 2017) pour conclure que la hyaluronidase peut être injectée par voie sous-cutanée et non en intravasculaires pour traiter l’embolie vasculaire provoquée par un produit de comblement. La quantité de hyaluronidase doit être importante à proximité du vaisseau sanguin pour dissoudre la charge à l'intérieur du vaisseau et il est recommandé d'injecter 100 UI pour chaque point.

On aborde pour finir les effets secondaires potentiels assez peu fréquents : prurit local et réactions allergiques. Il n'y a généralement pas de lien entre les antécédents d'allergies du patient et la réaction à la hyaluronidase. Cependant, selon l'origine de la hyaluronidase, des réactions croisées peuvent survenir chez les patients allergiques au collagène bovin et aux piqûres d'abeilles. L'incidence des réactions allergiques serait de 0,05 % à 0,69 %, et l'urticaire et l'œdème de Quincke représenteraient moins de 0,1 %. Les réactions allergiques semblent augmenter lorsque la dose de hyaluronidase injectée est importante supérieure à 100 000 UI en injection intraveineuse, et la survenue de complications allergiques s'élève à 31,3 % si la dose augmente à 200 000 UI. La plupart des réactions allergiques à la hyaluronidase sont des réactions d'hypersensibilité immédiate mais des réactions d'hypersensibilité retardées médiées par les lymphocytes T peuvent également survenir parfois 24 heures après. Pour les réactions d'hypersensibilité immédiate (œdème érythémateux après 1 à 2 heures après l'injection) les auteurs citent les stéroïdes systémiques, les antihistaminiques et un dermocorticoïde.

Le test cutané est réalisé avec 3 UI de hyaluronidase et lu à 20 mn ; il est recommandé avant d'utiliser la hyaluronidase, mais cela me semble inadapté aux situations d'urgences que représente un embol vasculaire. Un test négatif ne présagera pas par ailleurs d'une possible mais très rare allergie retardée.

La conclusion des auteurs est que la hyaluronidase est utile dans diverses situations et qu'il est indispensable de bien connaître son mécanisme d'action, son métabolisme et ses effets secondaires.

Il s'agit d'un travail de synthèse utile mais un peu décevant au final, un peu trop « scolaire » colligeant des informations sans réelles discussions ni références personnelles sur les conduites à tenir. On aurait aimé que l'utilisation médicale en esthétique soit plus développée avec des protocoles détaillés et plus pratiques.

Ce chapitre est assez succinct et aurait mérité plus « de matière » alors que celui portant sur les types de hyaluronidases, leur répartition et leur classification est certes intéressant pour notre culture générale mais n'apporte rien pour notre pratique.