Nécrose cutanée faciale imminente et atteinte oculaire après injection dermique de filler : à propos d’un cas

Article analysé par Martine DARCHY
Supervisé par Isabelle Rousseaux

Nécrose cutanée faciale imminente et atteinte oculaire après injection dermique de filler : à propos d’un cas

Salval A- Cianco F – Margara A -Bonomi S Impending Facial Skin Necrosis and Ocular Involvement After Dermal Filler Injection : A Case Report .

Aesth Plast Surg 2017 oct ; 41(5) :1198-1201

Si les injections de fillers dermiques sont en constante augmentation, l’injection par des personnes non qualifiées aussi. L ’article rapporte un cas de complications graves survenues chez une femme jeune asiatique, après injection de filler dermique par une personne non qualifiée.

L’article rappelle la fréquence et le nombre croissant des procédures esthétiques effectuées dans le monde entier et en particulier les injections de fillers et les risques graves de nécrose cutanée et de cécité encourus lors de telles procédures .Le mécanisme en est une atteinte vasculaire soit par compression soit par injection intravasculaire et embolisation rétrograde. Les injections ne sont sures que dans des mains expérimentées.

La particularité de cette observation est que la patiente jeune, 22 ans, chinoise ne parlant que le mandarin a été injectée à Milan par une amie du même âge, aux diplômes inconnus avec un matériel inconnu, probablement de l’AH, sur 3 sites : 2 au milieu du front, 1 au bout du nez.

Les symptômes douloureux ressentis par la patiente durant l’injection ont été ignorés par l’injecteuse et la personne a été renvoyée chez elle sans soin ni recommandation. Aucune observation n’a été faite.

La première consultation a été faite 24 heures après l’injection, pas d’observation notée et un traitement incomplet par un médecin généraliste non habitué à ce genre de problème : antibiotiques et packs de chaud.

Seulement 72 heures après l’injection la patiente sera revue examinée, et l’on note une atteinte cutanée type nécrose plus une atteinte oculaire sans cécité : rougeurs œdèmes dans les zones injectées (front médian et pointe du nez), œdème paupière supérieure gauche et hémorragie sous conjonctivale, impossibilité de relever la paupière supérieure gauche. Des pustules jaunes recouvrent la peau atteinte. Là débute sa vraie prise en charge, prélèvements, biologie, examen radio de la peau, la patiente refuse la biopsie ce qui élimine la possibilité de reconnaitre le produit injecté et examen ophtalmologique : pas atteinte de la rétine ni hémorragie ni thrombose. Bilan normal en dehors d’une inflammation. La microbiologie étant négative la patiente sera mise sous corticothérapie par voie IV, les symptômes régressent,

La cicatrisation est obtenue avec séquelles au niveau du front et du nez.

La patiente est repartie dans son pays après quelques semaines, aucun retour de sa part.

L’article rappelle

– l’anatomie vasculaire de la face. (On peut regretter le manque d’iconographie anatomique dans cet article) et

– l’urgence du traitement : détection rapide des symptômes : douleurs , changement de couleur de la peau, trouble de la vue, gonflement , la nécessité d’agir avant 48 heures mais dans ce cas le retard au diagnostic ne l’a pas permis. Le meilleur traitement est la rapidité. L’injection de hyaluronidase en cas d’acide hyaluronique est le gold standard (la on ne connait pas le produit) 20 à 300 UI par cm2 de peau atteinte.

L’auteur regrette le manque de consensus sur le sujet.

Des consensus de groupe d’expert existent notamment :

– Signorini M, Liew S, Sundaram H et al (2016) Global aesthetics consensus group.global aesthetics consensus :avoidance and management of complications from hyaluronic acid fillers-evidence- and opinion -base review and consensus recommendations .Plastic reconstruc Surg 137(6) :961 e.

– J.Clin Aesth Dermatol, 2018 juin ;11(6) E61-E68 This Month’ guideline :T he use of hyaluronidase .Il existe aussi un guide pour manager les nécroses et un guide pour constituer un kit d’urgence.

L’auteur appelle avec raison à la possible création d’un consensus mondial sur le sujet, et à une prise en considération des autorités sur le phénomène des injections sauvages et des risques encourus par la population et de leur gravité.

Pas d’injection rapide, ni en grande quantité au même point ni avec une forte pression.

Reconnaissance des symptomes et action immédiate si besoin : la hyaluronidase étant indispensable : avoir un kit de traitement sur place.

Cet article a l’intérêt de faire le point sur l’extension des nouvelles pratiques d’injection par des personnes ignorantes, non formés, la nécessité d’alerter les gouvernements sur les risques de ces pratiques et de nous rappeler les prises en charge de ces complications rares mais gravissimes même si les injectables sont de plus en plus surs.