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Réactions cutanées signalées après la vaccination contre la COVID 19 par Moderna et Pfizer : une étude basée sur un registre portant sur 414 cas.
Cutaneous reactions reported after Moderna and Pfizer COVID-19 vaccination: A registry of 414 cases
Devon E. McMahon, BA, Erin Amerson, MD, Misha Rosenbach, MD, Jules B. Lipoff, MD, Danna Moustafa, BS, Anisha Tyagi, BA, Seemal R. Desai, MD, Lars E. French, MD, Henry W. Lim, MD, Bruce H. Thiers, MD, George J. Hruza, MD MBA, Kimberly Blumenthal, MD MSc, Lindy P. Fox, MD, Esther E. Freeman, MD PhD
Publié le 07 avril 2021- DOI – http://doi.org/10.1016/j.jaad.2021.03.092
Partant du fait que les aspect cliniques de réactions cutanées aux vaccins à ARNm anti COVID 19 n’étaient pas bien documentés du fait de l’urgence de la mise sur le marché, l’objectif de cet article est de recenser les réactions cutanées immédiates et retardées après vaccin à ARNm contre le covid 19 Moderna et Pfizer, de caractériser les lésions cliniques, leurs délais d’apparition après le vaccin, leur durée, leur intensité et leur gravité, après la première et la deuxième dose dans le but de pouvoir mieux informer sur les risques post vaccinaux.
De décembre 2020 à février 2021, ont été enregistré 414 réactions cutanées aux vaccins à ARNm contre la COVID-19 de Moderna (83 %) et de Pfizer (17 %).
Modalités
L’inscription des cas dans le registre n’était ouverte qu’aux travailleurs de la santé. Les données recueillies ont été anonymisées.
Le module vaccinal du registre a recueilli les dates pour les doses de vaccin, la morphologie de la ou des réactions cutanées, le délai d’apparition et la durée de la ou des réactions et les traitements. Les réactions locales au site ont été définies comme se produisant dans les 3 jours suivant la vaccination de la première dose et les réactions locales importantes retardées ont été définies comme se produisant 4 jours ou plus après la première vaccination. Une papule au site du vaccin a été considérée comme une réaction locale importante immédiate ou retardée, selon le moment. Les réactions urticariennes ont été définies comme des papules dans une distribution au-delà du site d’injection.
Résultats
Les cas ont été signalés par des dermatologues (30%), d’autres médecins (26%), des praticiens de niveau intermédiaire (8,8%), des infirmières (13%) et d’autres travailleurs de la santé (22%).
Des résultats des réactions pour les 2 doses ont été obtenues sur 180 patients soit 43 % : (21%) après la première dose seulement, (63%) après la deuxième dose seulement et 29/180 (16%) aux deux doses. Sur les 67 patients qui ont eu une réaction cutanée à la première dose, (43%) ont également eu une réaction cutanée à la deuxième dose. Sur ces 29 patients qui ont signalé des réactions après les deux doses, (28%) ont signalé des réactions similaires aux deux doses, (28%) ont signalé une réaction moindre à la deuxième dose et (45%) ont signalé une réaction plus robuste à la deuxième dose.
Sur les 414 cas enregistrés, 85% ont été correctement rentrés sur le registre. Le temps médian d’apparition des symptômes lors de la première vaccination est de trois jours se répartissant en deux groupes : un et trois jours et sept jours. Lors de la deuxième vaccination, le temps médian est plus court de 1 jour. Aucune réaction d’urticaire et œdème de Quincke immédiat n’a été noté après la première dose (immédiat étant le premier jour dans les 4 heures suivant l’injection). Sur les 18 patients qui ont signalé une urticaire après leur première dose de vaccin pour laquelle des informations sur leur deuxième dose de vaccin ont été saisies, l’urticaire ne s’est développée que chez 4 (22%) après leur deuxième dose, la plupart (n = 3) signalant une urticaire plus étendue.
Cette analyse devrait rassurer les praticiens qui conseillent les patients qui ont eu une réaction cutanée après la première dose du vaccin de Moderna ou de Pfizer concernant leur deuxième dose car il n’y a eu aucun cas d’anaphylaxie ou d’autres événements indésirables graves.
Parmi les 414 réactions cutanées aux vaccins à ARN messager COVID-19 de notre registre, les aspects les plus courants ont été des réactions locales importantes retardées, des réactions locales au site d’injection, de l’urticaire et des éruptions morbilliformes. Moins de 50 % des patients présentant des réactions cutanées après la première dose ont présenté une récidive de la deuxième dose. Aucun événement indésirable grave n’a été signalé. 9 rapports de gonflement aux sites d’injection esthétique, 8 lupus pernio/engelures, 10 zonas varicelle, 4 poussées d’herpès simplex, 4 réactions de type pityriasis rosé et 4 éruptions cutanées chez les nourrissons de mères allaitantes vaccinées.
Nous avons également observé des réactions aux vaccins de Moderna et de Pfizer qui avaient été notées après l’infection par le SRAS-CoV-2 elle-même y compris des lupuspernio/engelures (par exemple : les « orteils COVID »), l’érythromélalgie et les exanthèmes de type pityriasis-rosé.
Il est important de noter que les symptômes cutanés allergiques rapportés dans cette étude, tels que l’urticaire, l’œdème de Quincke et/ou les éruptions morbilliformes, peuvent ne pas être causés par une allergie au vaccin mais plutôt liés à la réponse immunitaire de l’hôte ou à une réaction immunologique aux agents anti-inflammatoires non stéroïdiens couramment pris pour la douleur et la fièvre après la vaccination.
Une autre limite de cette analyse du registre comprend un suivi incomplet des dossiers. Une limitation supplémentaire est que la description morphologique des réactions vaccinales dépend du fournisseur.
Il peut y avoir un biais de confirmation car les prestataires étaient plus susceptibles d’entrer dans des cas avec des manifestations graves ou rares. Le registre a noté 343 réactions du vaccin de Moderna et seulement 71 du vaccin de Pfizer mais il faudra des données supplémentaires au niveau de la population pour comprendre s’il s’agit d’une véritable différence ou d’un biais de déclaration. Au 22 février 2021, 53 % des doses de vaccin attribuées aux États-Unis étaient Moderna et 47 % Pfizer.
Quatre-vingt-dix pour cent des réactions vaccinales ont été rapportées chez des patientes. Il est difficile d’évaluer s’il existe une véritable différence liée au sexe dans la probabilité de développer une réaction cutanée ou si elle pourrait refléter un biais de déclaration ou provenir du fait que le personnel de santé est composé à 76 % de femmes.
Dans notre registre, aucune séquelle sévère n’a été identifiée après la deuxième dose chez les patients présentant une réaction importante retardée après la première dose. Les patients ont bien répondu aux corticostéroïdes topiques, aux antihistaminiques oraux et/ou aux analgésiques. Ces réactions ont disparu après une médiane de 3-4 jours.
Prises ensemble, ces données rassurent les clinicIens chargés de conseiller les patients qui ont connu une réaction cutanée retardée du bras après leur première dose de Moderna que (1) les patients ont toléré la deuxième dose sans subir d’événements indésirables ou allergiques graves, (2) l’éruption cutanée peut réapparaître la deuxième fois mais est, en moyenne, susceptible d’être moins grave et peut se développer plus rapidement et (3) des traitements symptomatiques (p. ex : glace/soulagement de la douleur/antihistaminiques/corticostéroïdes topiques) peuvent être utilisés pour un traitement sans antibiotiques.
Mais différents biais de l’étude sont à noter. L’étude est faite aux USA seulement, sur une population biaisée de soignants en majorité des femmes et de sujets blancs. Par ailleurs on peut penser que lors de la deuxième vaccination, la déclaration au registre a pu être biaisée par la non-réponse en cas d’absence d’effets secondaire. Une autre limite de cette analyse du registre comprend un suivi incomplet des dossiers.
L’intérêt de cette étude est d’avoir répertorié et décrit les signes dermatologiques après vaccin ANTI-COVID 19 à ARN m (Moderna et Pfizer), leurs délais d’apparition, leur durée, l’absence d’effets secondaires graves.
On peut mieux informer et rassurer les patients qui veulent se faire vacciner mais cette étude demande à être poursuivie, de nombreux éléments de l’étude sont biaisés.
Caractéristique |
Moderna première dose (n = 267) n (%) |
Moderna deuxième dose (n = 102) n (%) |
Première dose de Pfizer (n = 34) n (%) |
Deuxième dose de Pfizer (n = 40) n (%) |
Réactions cutanées∗,† |
||||
Réaction locale importante retardée |
175 (66) |
31 (30) |
5 (15) |
7 (18) |
Réaction au site d’injection locale |
143 (54) |
71 (70) |
8 (24) |
10 (25) |
Gonflement |
117 (44) |
69 (68) |
6 (18) |
6 (15) |
Érythème |
132 (49) |
68 (67) |
6 (18) |
8 (20) |
Douleur |
94 (35) |
60 (59) |
8 (24) |
7 (18) |
Urticaire dans les 24 heures |
0 |
2 (2.0) |
0 |
1 (2.5) |
Urticaire après 24 heures |
13 (4.8) |
5 (4.9) |
9 (26) |
7 (18) |
Urticaire moment inconnu |
3 (1.1) |
0 |
0 |
0 |
Morbilliforme |
11 (4.1) |
7 (6.9) |
6 (18) |
3 (7.5) |
Érythromélalgie |
5 (1.9) |
6 (5.9) |
1 (2.9) |
2 (5.0) |
Poussée de l’état dermatologique existant‡ |
3 (1.1) |
1 (1.0) |
8 (24) |
3 (7.5) |
Vésiculaire |
4 (1.5) |
1 (1.0) |
3 (8.8) |
2 (5.0) |
Lupus pernio |
3 (1.1) |
0 |
3 (8.8) |
2 (5.0) |
Zon (VZV) |
5 (1.9) |
0 |
1 (2.9) |
4 (10) |
Œdème de Quincke |
5 (1.9) |
0 |
0 |
1 (2.5) |
Pityriasis rose |
1 (0.4) |
0 |
2 (5.9) |
1 (2.5) |
Érythème multiforme |
3 (1.1) |
0 |
0 |
0 |
Réaction aux produits de comblement |
3 (1.1) |
5 (4.9) |
0 |
1 (2.5) |
Vascularite |
2 (0.7) |
0 |
1 (2.9) |
0 |
Dermatite de contact |
3 (1.1) |
1 (1.0) |
0 |
2 (5.0) |
Réaction chez le nourrisson allaité |
0 |
1 (1.0) |
2 (5.9) |
1 (2.5) |
Apparition d’une nouvelle affection dermatologique§ |
2 (0.7) |
0 |
0 |
2 (5.0) |
Pétéchies |
1 (0.4) |
2 (2.0) |
1 (2.9) |
0 |
Autre‖ |
7 (2.6) |
8 (7.8) |
2 (5.9) |
3 (7.5) |